Paris-Saclay Cancer Cluster et l’Institut Polytechnique de Paris : l’innovation en ordre de bataille contre le cancer

Il est aujourd’hui admis qu’une femme sur six et un homme sur cinq développeront un cancer au cours de leur vie. Même si les progrès de la recherche et de la médecine augmentent régulièrement les chances de survie à 5 ans (30 % en 1970, 50 % en 2000, 80 % en 2030), la maladie reste la deuxième cause de mortalité à travers le monde (la première dans les pays développés) et le nombre de cas progresse du fait du vieillissement et de l’augmentation de la population (+ 2% en 2040).*
Un écosystème pointu de soutien aux innovateurs
Depuis février 2022, le Paris-Saclay Cancer Cluster (PSCC), dont l’Institut Polytechnique de Paris (IP Paris) est membre fondateur aux côtés de l’Université Paris-Saclay (UPSaclay), de l’Inserm, de Gustave Roussy et de Sanofi, s’organise face à ce phénomène. Doté d’un financement de 100 M€ sur dix ans dans le cadre du programme France 2030, il construit un écosystème performant de soutien aux acteurs de l’innovation en oncologie. Le PSCC agit comme un catalyseur pour transformer des approches potentiellement révolutionnaires en solutions diagnostiques et thérapeutiques industrielles pour lutter contre le cancer. L’objectif étant de rendre le dépistage et les traitements plus prédictifs, précis et efficaces, pour le bien des patients.
« Les startupers et la communauté scientifique des laboratoires et des hôpitaux sont notre public principal », souligne Elsa Angelini, professeure à Télécom Paris, spécialiste de l’informatique des images médicales et du Deep Learning et correspondante académique de l'Institut Polytechnique de Paris pour le Paris-Saclay Cancer Cluster. « Nous leur offrons un catalogue de services de pointe pour les soutenir dans leur projet de maturation. Les écoles d’ingénieurs de l'Institut Polytechnique de Paris apportent par exemple une expertise solide dans la science des données, l’apprentissage statistique et les mathématiques mais aussi en biologie et en imagerie microscopique de pointe. Les innovateurs ont accès à un vivier d’experts, au savoir-faire de nombreux laboratoires et à des infrastructures expérimentales de haut niveau », ajoute la chercheuse. Des structures comme le Laboratoire d’Optique et Biosciences (LOB**) de l'École polytechnique, dont l’expertise en imagerie n’existe nulle part ailleurs, sauront par exemple éclairer des projets axés sur l’étude de tissus. Côté IP Paris, une startup de l’Institut pourra solliciter les conseils d’un médecin spécialisé dans certains types de cancers et tester la pertinence de sa technologie.
Le PSCC finance en outre des plateformes technologiques d’envergure installées dans ses hôpitaux partenaires. Analyse, séquençage, dépistage…, ces infrastructures particulièrement coûteuses sont accessibles aux projets accompagnés par le PSCC et plus largement à l’écosystème de l’innovation en France. Cinq plateformes ont d’ores-et-déjà été validées : analyses single-cell et transcriptomics, thérapie cellulaire, immunothérapie, organes explantés, essais cliniques précoces. Les sujets sont nombreux et les premiers travaux ont commencé en2024. Le PSCC pourra identifier d’autres plateformes par la suite et s’atteler à rendre possible leur lancement. Elles disposeront alors de deux ans pour devenir financièrement autonomes.
Un projet de plateforme inter-hospitalière dédiée à la donnée de santé en oncologie
L’une de ces infrastructures sera dédiée à la data. C’est un des gros enjeux du cluster qui souhaite faciliter l’accès de son écosystème aux données de vie réelle, y compris les échantillons biologiques associés qui se trouvent dans les établissements de santé. Les données consultables depuis plusieurs lieux seront anonymisées, nettoyées, structurées, et interopérables. « Cet énorme chantier structure et associe les informations issues d’imageries, de dossiers patients et d’analyses biologiques auprès d’hôpitaux français (et plus tard européens) spécialisés dans la lutte contre le cancer, grâce à un modèle de données commun. Cela demande un gros travail sur la sélection des variables cliniques, la structure des données nettoyées et la technique d’intégration via un portail permettant d’interroger plusieurs établissements à la fois. Une étape clé a été franchie en 2024 avec la signature de conventions engageant les trois premiers établissements hospitaliers de la plateforme », explique Elsa Angelini.
En termes de diagnostic, l’accès à de telles données sera par exemple un atout pour entraîner un algorithme à interpréter un examen d’imagerie (Scanner, IRM...) sur de très grandes cohortes couvrant la grande diversité d’appareils utilisés en routine clinique. Cela apportera également des informations essentielles sur les différents profils de patients en vue du développement de nouvelles molécules médicament. « Les groupes pharmaceutiques dépensent actuellement des millions de dollars aux États-Unis pour acheter ces données structurées car elles n’existent pas en France. C’est un non-sens car cela concerne des populations américaines dont l’environnement et le mode de vie sont différents des populations françaises et/ou européennes. Or, la prise en compte de ces paramètres est essentielle dans la compréhension d’un cancer et la lutte à engager contre lui. Il y a donc des enjeux non seulement économiques, cliniques et scientifiques mais aussi sociétaux à construire la plateforme », souligne la chercheuse.
Des formations adaptées aux porteurs de projets d’innovations
Le Paris-Saclay Cancer Cluster active également le levier de la formation pour soutenir l’innovation. « Nous ne proposons pas à ce stade de diplômes aux innovateurs du PSCC. Par contre, nous complétons leurs connaissances via un catalogue de formations d’IP Paris qui leur sont ouvertes. Avec l’université Paris-Saclay, nous réfléchissons également à des modèles de parcours dédiés en biotechnologies, ingénierie biomédicale, sciences de données et en innovations, avec différents niveaux de modules adaptés aux contraintes des porteurs de projets innovants ».
L’écosystème du PSCC se veut donc complet et l’entrée y est sélective afin de favoriser des projets en phase précoce, scientifiquement créatifs et à très fort potentiel thérapeutique ou diagnostique. Par ailleurs, l’association PSCC Connect permet d’intégrer l’écosystème du cluster, sans sélection, pour tous les acteurs économiques qui souhaitent s’engager dans la lutte contre le cancer. « PSCC Connect crée de nouvelles opportunités de collaborations pour ses membres. Elle leur offre également une vision unique sur le développement des innovations et peut leur ouvrir les portes vers un accompagnement personnalisé », conclut Elsa Angelini.
*source PSCC

À propos :
Elsa Angelini a obtenu une licence en sciences en 1996 à l'École centrale de Nantes (Nantes, France). Elle a rejoint le département d'ingénierie biomédicale de l'université de Columbia en 1997 et a obtenu une maîtrise en sciences en 1998. Elle a obtenu un doctorat en ingénierie biomédicale à l'université Columbia en 2003. Elle est restée à l'université Columbia en tant que post-doctorante jusqu'en mars 2004. Elle a ensuite rejoint le département de traitement des images et des signaux de Télécom Paris où elle est professeur associé avec une spécialisation dans le traitement des images pour les applications d'imagerie biomédicale (actuellement en congé, mais la double affiliation est maintenue). En 2010, elle a passé 5 mois sabbatiques en tant que Visiting Scientist dans le Biomedical Imaging Group du CSIRO-Australian e-Health Research Center, Brisbane, Australie. Elle a obtenu son Habilitation à Diriger des Recherches (HDR) en 2011. Depuis 2012, elle est affiliée à l'Université de Columbia, en tant que chercheur associé et codirectrice du Heffner Biomedical Imaging Laboratory. Elle est également affiliée à l'Imperial College London depuis 2016, au sein de l'ITMAT Data Science Group (NIHR Imperial Biomedical Research Centre) en tant que Senior Research Data Scientist. Depuis 2023, elle est professeur à Télécom Paris, dans le département IDS. Elle est coauteur de plus de 150 publications évaluées par des pairs. Elle codirige la filière BioImaging du programme de master BME-Paris.
Ses recherches portent sur :
- L'apprentissage automatique pour les applications d'imagerie médicale et biologique.
- Les applications cliniques liées aux modalités d'imagerie multidimensionnelle pour le débruitage, l'amélioration et la segmentation.
- Le traitement de l'image et du signal, décompositions éparses, vision par ordinateur, infographie et visualisation scientifique.
- L'amélioration de la qualité des images pour différentes modalités cliniques et applications diagnostiques.
- La quantification et phénotypage des structures anatomiques et des fonctions physiologiques avec des associations cliniques.
- La modélisation anatomique.
**LOB : une unité mixte de recherche CNRS, Inserm, École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, 91120 Palaiseau, France
Contacts au sein de l'Institut Polytechnique de Paris :
>> Elsa Angelini, correspondante académique de l'Institut Polytechnique de Paris pour le PSCC et membre du comité du pilotage du centre interdisciplinaire Engineering for Health et professeure à Télécom Paris.
>> Silvia Corsini, directrice des opérations au centre interdisciplinaire E4H.